La corporéité

Fred Poché 1 souligne la place centrale du corps.

(…) nous n’avons pas, à proprement parler, un corps, mais nous sommes, chacun, un corps. Consentir à la corporéité, c’est laisser une place à la ritualité, au « contact » avec l’autre, au consentement à l’aide que peut nous apporter autrui et que nous pouvons lui apporter. 2(…)

Les bras

Hélène SADOVSKA, danseuse soliste du Ballet des Champs Elysées, professeure de danse, raconte l’anecdote suivante (F.Culture, La fabrique de l’histoire, lundi 15 juin 2009): un photographe a pris des photos de danseuses classiques. A l’édition des tirages, la danseuse de l’école française regarde d’abord son visage, l’Anglaise observe ses jambes, et la danseuse formée à l’école des ballets russes regarde ses bras.

Elle rappelle: oui, ce qui est remarquable dans l’école russe est l’attention portée aux bras, au haut du corps, au buste. Parce que le mouvement est lié à la respiration. Elle dit: d’abord la respiration, puis le mouvement !

La connaissance comme trajet

En décembre 2002, Paul VIRILIO est l’invité d’une émission de France Culture. Il y parle de la vitesse et du mouvement. Je note au vol certains de ses propos.

La connaissance est liée non seulement à un objet, mais aussi à un trajet. Tout est aujourd’hui en mouvement. Dis-moi ton trajet, je te dirai qui tu es. La victoire est dans le mouvement, dans la vitesse. Nous vivons dans un monde de l’instant, de la relation instantanée1Ce qui prédomine donc : la figure du danseur.

Le boum & le hey

Cynthia Loemij, danseuse de la Compagnie Rosas, expliquait que le geste qui fonde le travail de la chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker est simple et s’illustre en deux interjections : le « boum » et le « hey ».

Le « boum » marque la battue, le point d’impact, le rapport au sol, à la terre, mais aussi à la mort, au « lâcher-prise ».
Le  « hey » est le cri de l’envol, de la posture aérienne, et symboliquement le mouvement de la vie.

Ces deux interjections ne s’illustrent pourtant pas dans un geste, mais s’expriment dans le souffle. Il y a là une belle analogie avec le travail du chanteur : dans le chant, le mouvement d’expiration – qui est celui de la profération, de la mélodie, du cri, … est un geste actif, tandis que le moment de l’inspiration correspond à la détente, à l’ouverture, il doit être le moment parfait du relâchement et de l’inactivité. Et non l’inverse. Le « boum » est donc inspiration, détente du ventre, du visage, reprise d’élasticité et retour vers le sol, ce qui est « en bas » ;  le « hey » est lié à l’expiration active, c’est le chant qui s’élève, le dessin aérien par excellence.