Ciels d’Edinburgh

En octobre dernier, escapade de quelques jours à Edinburgh où je n’étais plus allé depuis des années. Le temps était à la pluie mais traversé de grandes éclaircies soyeuses dans la lumière de l’automne écossais.

Voici le ciel de pluie sur la vieille ville et le château. Et voici le ciel de la bibliothèque de la Scottish National Portrait Gallery, qui m’évoque immanquablement le plafond constellé de la gare de New York, Grand Central. Correspondances stellaires dans les yeux du voyageur, que sa fatigue et le dépaysement imprévu rendent presque mystérieuses.

Un terrain vague

Et ici le réel – les gens, donnés comme une masse, milliers de mémoires actives se croisant, autrefois dans les fumerolles, aujourd’hui sous le cliquetis des tableaux d’affichage automatiques, tressant de phrases effilochées, condamnées au désordre par la violence impressionniste du lieu. (…) Partout et toujours la gare est comme un terrain vague où n’importe quelle bouture humaine peut prendre et où flotte, mais comme impuissante, une vague rumeur solidaire.

Jean-Christophe BAILLY, Le propre du langage, p. 90

Angoulême

La gare d’Angoulême n’a vraiment rien de remarquable. J’y passe, je m’y arrête quelquefois. J’aime me rendre à Angoulême, au moins pour le temps que je prends, quand c’est possible, à déambuler une heure ou deux dans la vieille ville, haut perchée, dans le soir tombant. J’ai des souvenirs d’arrière-saison, froide et ensoleillée, dans des rues tranquilles: rares passants, quelques voitures, échanges de paroles qui résonnent entre les murs des vieux immeubles. Un matin, cependant, très tôt, avant d’embarquer dans le petit train régional qui devait me conduire vers ma destination finale, je marque le pas devant une stèle dressée à proximité immédiate de la gare. Ce n’est pas un monument ancien, la pierre est brillante encore, la gravure du texte commémoratif porte un or tout neuf1. C’est un granit rose, fiché dans une dalle de béton, au bord de la rue qui monte vers la ville. Continuer la lecture de « Angoulême »

Limoges Bénédictins

Depuis quelques années, j’ai l’occasion de me rendre à Limoges, une ou deux fois par an, par le train. J’arrive quand la nuit est tombée, après six ou sept heures de voyage. En sortant de la gare, je me dirige vers un petit hôtel proche, parfois le même, parfois un autre, mais sur le trajet duquel j’ai la chance de pouvoir me retourner et admirer, sous le ciel nocturne, la gare illuminée. Et c’est chaque fois le même ravissement: le bâtiment éclairé, vide à cette heure – il n’y aura plus que quelques trains nocturnes avant la nuit complète, offre l’image étrange, chimérique et merveilleuse d’un décor de film fantastique.