La littérature / Bergounioux II

La littérature ne vaut pas une minute de peine si elle produit des objets tiers pourvus de propriétés esthétiques, formelles, qu’on peut se borner à admirer mais qui sont, comme dit Montaigne, sans nuisances et sans conséquences.Pour moi, la littérature, ça aide à vivre, ça clarifie l’expérience par définition ombreuse, douloureuse, énigmatique qui est la nôtre.

Pierre BERGOUNIOUX, interview dans l’émission Des mots de minuits, France2, 11 avril 2012

La transmission

Dans une émission du samedi matin [en novembre 2007], animée par Alain Finkielkraut, Alain-Gérard SLAMA évoque la littérature. En vieillissant, dit-il en substance, je mesure de plus en plus que la littérature est le fondement, le tissu, le lieu d’une sociabilité réelle.

Il se refuse à utiliser le mot appartenance. Il fait en quelque sorte l’éloge de la transmission. Moi-même, je m’y reconnais, je suis l’héritier de cette tradition. Mes parents étaient tous les deux des lecteurs et ils m’ont transmis cette culture, par leur amour des livres et de la lecture. J’ai réalisé, il y a quelques années, que mon travail de direction de chœur était aussi largement animé par ce souci de la transmission. Et que l’objet en était un héritage que je sens à la fois extraordinairement partagé – le chant polyphonique est une pratique d’un grand nombre de peuples du monde, même s’il est profondément discrédité par une société marchande qui assure la promotion et la vente de produits culturels pré-formatés, et singulier – parce que j’y trouve ce qui fait mon caractère et mon plaisir de l’accord. Finkielkraut allait plus loin, dans où une voie où je refuse de le suivre : il parlait des professeurs d’aujourd’hui, en charge de la transmission de la culture classique, comme des membres d’une ONG humanitaire qui ne travaillent plus dans l’ordre de la transmission mais dans l’ordre de la pitié. Consternant ? … Terrifiant !

Livres et bibliothèques

La revue Conférence présentait naguère (n°24, printemps 2007) quelques pages consacrées aux livres et à la lecture, avec des contributions de Giuseppe Pontiggia, Maurice Chappaz, François Debluë, Brian Stock.

Christophe Carraud a choisi, traduit et présenté les pages de Giuseppe Pontiggia sous le titre Livres et bibliothèques. Je ne peux que vous encourager à vous y plonger – voir le site de Conférence. L’accès à l’intégralité des textes exige de s’abonner, mais c’est une dépense largement compensée par un vrai bonheur de lecture. N’hésitez pas ! Pontiggia, écrivain, critique littéraire, admirable érudit est plein d’humour. Sa passion des livres est illustrée ici dans une suite jubilatoire de petits chapitres. Les intitulés en constituent le programme: Enfer et paradis de la librairie ancienne / Catalogues et vices / Sur l’achat des livres /  Voyages aux alentours / De la fureur d’avoir des livres et de les accumuler / Bibliothèques en flammes / « Lisez-vous un livre par an ? » / Le livre comme expérience / Hesse et la bibliothèque universelle / L’utile littéraire / Le chien et la tortue / L’utile pour le lecteur / Goûteurs de livres / Lecture créative / Auteur, lecteur et non lecteurs / La réception de la littérature / Entretien éclair / L’orgueil de l’ignorance / Sur la réanimation d’un vice / Un livre pour la nuit / L’exposition d’Isis / Lire.

Il y a là 50 pages de pure jouissance pour les amateurs de livres.

Par ailleurs, profitez-en pour explorer le site consacré à Pontiggia.