L’espace intérieur

Comment être pensé par la nature.

C’est comme s’il y avait une merveille constante autour de nous dans la nature, mais qui ne peut être touchée réellement… Qui peut être observée tout le temps, mais qui ne peut être touchée réellement que dans l’espace intérieur qui est en nous, qui est beaucoup plus immense qu’on ne l’imagine ; la nature ne peut correspondre à cet espace intérieur qu’à l’improviste, par surprise, tout à coup. Et il faut laisser un rythme physique avec la marche, le pied, le souffle, la respiration et puis l’esprit en même temps, libre par rapport à cela. Regarder, détailler le monde sans insister, pouvoir s’en apercevoir. (…)

Maurice CHAPPAZ, A-Dieu-Vat, Entretiens avec Jérôme Meizoz, p. 99

Mémoires indiennes

Le film de Arthur LAMOTHE, Mémoire battante (1992), est un très long document sur ce qui restait de la vie traditionnelle des Indiens Montagnais dans le Nord Québec, à la fin des années 60 et dans le courant des années 70, au moment où il a réalisé ce reportage: la vie dans la réserve, la vie sauvage, la chasse, les pratiques rituelles (la « suerie », …) , l’évocation des rites (la « tente tremblante »), la langue, le vocabulaire extrêmement subtil qui touche à la nature, à la géographie des lieux, aux pratiques rituelles, …

En écho, je me souviens d’avoir vu, il y a quelques années, un autre film canadien: Voyage en mémoires indiennes, de Jo BERANGER (2004). C’est le long parcours du souvenir de l’acculturation violente subie par de nombreux enfants, arrachés à leurs parents, à leur vie, pour être « civilisés » de force dans des écoles animées par des congrégations religieuses.
Voir à ce sujet: les excuses officielles du gouvernement canadien, en 2008, comme condition de réconciliation.

Ce film présente aussi une expérience tout à fait originale d’école reprise et gérée entièrement par une communauté indienne du centre du Canada: le Blue Quills First Nations College. Un modèle (unique ?) de prise en charge de l’éducation des enfants des « peuples premiers », dans le respect de leurs traditions ancestrales. A voir.1

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La gorge, l’intime

L’humanisme de Rabelais reprend au fond tous les points faibles de l’humain et, au lieu de les arrêter en quelque économie de la faute et du salut, en montre la profonde fécondité dans la relation à soi et aux autres. Et peut-être n’a-t-il jamais été aussi rigoureux que lorsque dans sa lignée gigantale, il a identifié la gorge comme le point le plus sensible et le plus résonnant de l’être humain. « Pantagruel les prend à la gorge », c’est le trait le plus constant de la légende de Pantagruel avant même le roman rabelaisien. Après le travail d’élaboration du Maître chinonais, la gorge, qui est à la fois attente du Graal et point géométral de tout le cosmos, s’associe à un mot universel, TRINCH, « trinque », aux lettres susceptibles de toutes les permutations kabbalistiques, et c’est à cette gorge ouverte à la libre circulation entre le haut et le bas que reviendra la charge d’articuler le cri primordial, celui qui unit les hommes partageant la souffrance et le plaisir, invoquant Dieu dans toutes les langues du monde et accédant à la contemplation de la Nature dans toutes ses forces invisibles.

Bruno PINCHARD, Un tour du monde avec Rabelais, Dossier de l’ISH.

Intéressant, éclairant toujours, … pour les praticiens de la gorge ! J’ai « mal à la gorge » ? « Voix de gorge », « à gorge déployée », « la blancheur de votre gorge », … C’est l’intimité  qui est déployée. Ce qui explique aussi les pudeurs, les craintes, les angoisses, … dans la pratique vocale.

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