Écouter le monde

(…) Les trois hommes [Proust, Freud et Spinoza] apportent précisément le maillon qui manque, dangereusement, au bel énoncé liant interpréter le monde et le transformer: l’écouter. Écouter la musique des êtres, leurs rêves, leurs angoisses, leurs combats. Leur refus de se laisser asphyxier par le monde de la valeur. « Ne pas rire, ne pas pleurer, ne pas haïr, mais comprendre », écrit Spinoza dans son Traité de l’autorité politique. Entre interpréter et comprendre, il semble n’y avoir qu’une nuance. Elle est décisive, c’est toute la différence entre signification et sens.

Max DORRA, Quelle petite phrase bouleversante au cœur d’un être ?, p. 285

Les taciturnes

(…) Car l’Ecriture crépite de sens uniquement pour celui qui sait se disposer à l’écoute, qui sait rester longtemps silencieux. Une telle pratique est considérée aujourd’hui comme une malformation, on soigne les taciturnes avec de bons résultats. (…) Dans le rock and roll fébrile des besoins et des désirs on se démène sur la piste seulement pour soi-même. L’unique intégrisme actuel est la surdité.

Erri DE LUCA, Comme une langue au palais, p.60