Un seul art

Difficile, pour un homme ordinaire, de pratiquer deux arts à la fois. Ils sont rares ceux qui ont pu développer deux pratiques artistiques, et ce n’est pas par hasard qu’on se souvient du violon de monsieur Ingres … Plus près de nous, une artiste qui me touche et dont j’admire le talent, Juliette Binoche, est à la fois comédienne, danseuse et peintre. Mais, à l’écouter et à la suivre, on comprend qu’en toutes choses elle a placé un travail considérable, avec une énergie et une détermination dont peu sont capables. En tout cas, pour un praticien amateur qui n’a pas la possibilité de se consacrer entièrement à son travail artistique parce qu’il exerce par ailleurs un métier1, une seule pratique artistique, c’est beaucoup.

C’est beaucoup, parce que l’engagement réel, approfondi, qui aboutit à une véritable maîtrise, requiert énormément d’énergie. Et, en tout premier lieu, une attention constante, une écoute et une ouverture à tout ce qui peut alimenter la pratique de cet art. Je m’oppose à ceux qui veulent faire croire que certaines pratiques sont plus faciles que d’autres et demandent donc beaucoup moins de travail. Il existe, dans le milieu choral français, une imposture assez répandue, qui voudrait faire croire que le chant choral est facile, sous prétexte que l’accès en est aisé: aucun instrument à acquérir; l’embarras du choix pour trouver un groupe qui vous accueille, quel que soit votre niveau de départ. Continuer la lecture de « Un seul art »

Accompagner

Claude LEFORT, dans une conférence qu’il a donnée le 17 novembre 2007, rappelle: dans toute démarche herméneutique, dans tout travail d’interprétation (d’un texte, d’un programme, d’une injonction,…), nous devons renoncer au projet de maîtriser le texte mais plutôt choisir l’accompagnement de sa signification. Il nous faut accompagner le sens et non vouloir le maîtriser.

Par analogie, je travaille sur ce geste d’interprétation: accompagner la ligne musicale et non pas vouloir en prendre possession. Physiquement, il est très important de figurer le geste de l’accompagnement, quand le bras s’arrondit pour laisser le passage, ou quand le bras s’offre pour accorder le pas, … etc.
Constamment , je reprends ce travail de l’accompagnement : ne prenez pas votre voix en otage, ne cherchez pas à maîtriser le son ou la musique, mais ayez simplement ce geste d’accueil, de soutien, … La sonorité de l’ensemble en est transformée. Mais – en répétition, et souvent ! – il faut absolument le geste.