Nos déprédations…

Il est bien sûr parfaitement prévisible que le poids du contenu de votre existence va déterminer vos préoccupations présentes, et vous êtes tout à fait impuissant face à cet ensemble de souvenirs et d’idéaux. Vous savez très bien que, selon notre propre vision de myope, seules les étoiles sont à l’abri de nos pulsions destructrices. Nous ne constituons qu’une seule espèce sur un total estimé à cent millions. Bon nombre d’entre nous ont pris plaisir à savourer notre domination sur toutes ces espèces. En fait, nous avons créé certains aspects de la religion pour nous rassurer et nous convaincre que nous avons raison de souiller toutes ces autres espèces à notre guise. Nous avons organisé une théocratie virtuelle du viol de la terre qui garantit le caractère acceptable, sinon sacré, de toutes nos déprédations. Je me rappelle que ceci est le monde dans lequel je vis. Je connais tous les détails. Rien n’a changé depuis que Mark Twain nous disait que le Congrès abritait les seuls vrais criminels de notre pays. Ces politiciens ont organisé leur propre jeu de canasta dans lequel la terre elle-même constitue un facteur parfaitement dérisoire.

Jim Harrison, En marge

La gorge, l’intime

L’humanisme de Rabelais reprend au fond tous les points faibles de l’humain et, au lieu de les arrêter en quelque économie de la faute et du salut, en montre la profonde fécondité dans la relation à soi et aux autres. Et peut-être n’a-t-il jamais été aussi rigoureux que lorsque dans sa lignée gigantale, il a identifié la gorge comme le point le plus sensible et le plus résonnant de l’être humain. « Pantagruel les prend à la gorge », c’est le trait le plus constant de la légende de Pantagruel avant même le roman rabelaisien. Après le travail d’élaboration du Maître chinonais, la gorge, qui est à la fois attente du Graal et point géométral de tout le cosmos, s’associe à un mot universel, TRINCH, « trinque », aux lettres susceptibles de toutes les permutations kabbalistiques, et c’est à cette gorge ouverte à la libre circulation entre le haut et le bas que reviendra la charge d’articuler le cri primordial, celui qui unit les hommes partageant la souffrance et le plaisir, invoquant Dieu dans toutes les langues du monde et accédant à la contemplation de la Nature dans toutes ses forces invisibles.

Bruno PINCHARD, Un tour du monde avec Rabelais, Dossier de l’ISH.

Intéressant, éclairant toujours, … pour les praticiens de la gorge ! J’ai « mal à la gorge » ? « Voix de gorge », « à gorge déployée », « la blancheur de votre gorge », … C’est l’intimité  qui est déployée. Ce qui explique aussi les pudeurs, les craintes, les angoisses, … dans la pratique vocale.

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