Janos Ber

Un dimanche d'automne, sous des torrents de pluie, je visite le Musée Matisse au Cateau-Cambrésis.

J'entre avec bonheur dans les salles d'exposition temporaire, consacrées pour cette dernière journée encore, au travail de Janos Ber. C'est un vrai moment de grâce. Les toiles les plus récentes dégagent une beauté et un équilibre parfaitement réjouissants. Je suis à nouveau transporté par cet étrange impression de me remplir d'énergie. La vibration des bandes de couleurs, le cadencement presqu'irrégulier, libre mais parfaitement maîtrisé, les tracés - qui m'évoquent aussitôt le travail d'Ubac, avec qui la parenté minérale n'est pas fortuite, constituent un foyer de vitalité extraordinaire.

Sur la couverture

Septembre 2010, un soir. L’air est très doux, l’obscurité envahit lentement les rues alors que le ciel reste clair. Je suis entré à La Hune, sur le boulevard St Germain, et je reste en arrêt devant la couverture d’un livre de Laszlo Krasznahorkai intitulé Au nord par une montagne, au sud par un lac, à l’ouest par des chemins, à l’est par un cours d’eau.

Dans les 4 directions, les 4 frontières sont celles d’un jardin mystérieux. Le livre tiendra ses promesses ! Pour en savoir un (tout petit) peu plus, voyez l’article sous la catégorie Langues d’ailleurs (Tissages).

Le petit-fils du prince Genji

Etrange et fascinant récit, que celui de L.Krasznahorkai – qui met en scène la quête intemporelle d’un jardin mystérieux, le jardin caché, le centième du célèbre livre Cent beaux jardins. Nous sommes dans le rêve, dans l’histoire, dans la méditation, dans la folie, dans une faille du temps, dans la contemplation zen, dans l’art japonais des jardins, dans le mystère incroyable de la naissance végétale, dans le regard éperdu de cet homme qui a consacré les siècles que dure sa vie à la recherche de ce mystérieux jardin. Et qui, au bout du compte, par inadvertance, par fatalité, par destinée de l’inaboutissement, passera juste à côté sans le voir, au coeur même du temple déserté qu’il a réussi à pénétrer.

Le récit se divise en 50 chapitres, dont manque le premier. Faille du livre ?
Un auteur hongrois pour un livre japonais. Un vrai bonheur de lecture.

Laszlo KRASZNAHORKAI, Au nord par une montagne, au sud par un lac, à l’ouest par des chemins, à l’est par un cours d’eau.
Traduit du hongrois. Publié à Paris chez Cambourakis en 2010.

Dans la cuisine

Je voudrais parfois entrer dans une maison au hasard, m’asseoir dans la cuisine et demander aux habitants de quoi ils ont peur, ce qu’ils espèrent et s’ils comprennent quelque chose à notre présence commune sur terre. On m’a assez dressé pour que je retienne cet élan qui pourtant me semble le plus naturel du monde.

Christian BOBIN, Ressusciter, p. 159