Tissage de la mémoire

Je croyais et je crois encore, après tout ce que nous avons vu et fait, que si vous vous projetez dans la masse des choses, si vous cherchez des choses, si vous cherchez, vous ferez par l’acte même de chercher, se produire quelque chose qui, sinon, n’aurait pas eu lieu, vous trouverez quelque chose, même quelque chose de petit, quelque chose de plus que si vous n’aviez rien cherché pour commencer, que si vous n’aviez pas osé poser la moindre question à votre grand-père. (…) Il n’y a pas de miracles, il n’y a pas de coïncidences magiques. Il n’y a que la recherche et, finalement, la découverte de ce qui a toujours été là.

Daniel MENDELSOHN, Les disparus, p. 610

Ce tissage de la mémoire m’est précieux depuis très longtemps. Je le dédie à mon père, René-Louis Pirson: il y a consacré la meilleure part de sa vie.

Le travail de deuil / incarnation

Le discours de l’historien reconduit les morts, les ensevelit. Il est déposition. Il en fait des séparés. Il les honore d’un rituel qui leur manque. Il les pleure. Car toute quête historique cherche  à calmer les morts qui hantent encore le présent et à leur offrir des tombeaux scripturaires. L’histoire est aussi une des modalités du travail de deuil, tentant d’opérer — avec bien des difficultés de tous ordres — l’indispensable séparation des vivants et des morts.

Annette WIEVIORKA, Auschwitz 60 ans après , pp.280-281