La corporéité

Fred Poché 1 souligne la place centrale du corps.

(…) nous n’avons pas, à proprement parler, un corps, mais nous sommes, chacun, un corps. Consentir à la corporéité, c’est laisser une place à la ritualité, au « contact » avec l’autre, au consentement à l’aide que peut nous apporter autrui et que nous pouvons lui apporter. 2(…)

Coexistence

Partons de la notion de « réforme », définie comme une amélioration partielle et progressive dans le domaine moral ou social, opposée à « révolution ». Amélioration pour qui ? Pour l’ensemble de la société, elle concerne l’intérêt commun, et, dans ce cas, ne peut être que pro-posée, c’est-à-dire présentée préalablement au regard, enjeu public, débattue par des intérêts pluriels, éventuellement conflictuels, visant néanmoins un accord. Par lui, la part des uns, la part des autres est censée trouver son compte, autrement dit une négociation bénéficiant à tous. Cette négociation suppose des concessions, une forme de lâcher-prise permettant un compromis, une conciliation. Insistance ici d’un cum qui marque et la procédure, se mettre ensemble, et la visée, une politique de coexistence permettant à chacun les moyens d’une existence et de son projet. Ce cum témoigne d’une vigilance à ne pas léser certains, remettant alors en exergue la parole de Solon à l’aube de la démocratie : « un tort fait à l’un nous concerne tous ». 1

Extrait d’un passionnant article de Elisabeth Godfrid: Des inventeurs pour une coexistence. Réformes et lâcher-prise, sur le site EspacesTemps. A lire entièrement, évidemment.

Solidaires

Jean-Marie PELT, botaniste et écologiste de renommée internationale, souligne1 la différence d’interprétation entre Max Weber (le meilleur, celui qui gagne, serait le plus méritant, preuve qu’il est béni des dieux – de Dieu) et Kropotkine, anarchiste russe, géographe, géologue et naturaliste, qui a étudié les mécanismes d’entraide dans la nature. Pour Kropotkine2, les individus les mieux adaptés ne sont pas les plus agressifs mais les plus solidaires. L’aide réciproque est l’arme la plus puissante dans la lutte pour l’existence contre les forces hostiles, la nature et les espèces ennemies, mais aussi le facteur le plus important du développement progressif.

Bien sûr, il y a, entre les deux hommes, un profond écart de culture politique. Mais je pense que la crise que nous vivons aujourd’hui – double crise de notre relation aux autres et à la nature, donne profondément raison à l’interprétation de Kropotkine.

Le Divers

Ne nous flattons pas d’assimiler les mœurs, les races, les nations, les autres; mais au contraire, réjouissons-nous de ne le pouvoir jamais, nous réservant ainsi la perdurabilité du plaisir de sentir le Divers.

Victor SEGALEN, cité par Patrick Corneau, Suite brésilienne, in Conférence n°15 (2002), p. 81