Précieux

Le précieux, le véritablement précieux est distribué sans le savoir et reçu sans contrepartie.

Henri MICHAUX, Poteaux d’angle


Précieux. Un bonze demanda un jour au bonze Sosan Daishi: Qu’est-ce qui est le plus précieux au monde ?

– N’importe quoi, une charogne, la tête d’un chat mort, répondit Sosan Daishi.

– Pourquoi ?

– Parce qu’on ne peut l’évaluer.

Dictionnaire abrégé du surréalisme.

Trois sortes d’acteurs

Il y a plusieurs sortes d’acteurs.
D’abord ceux qui ne savent que mimer les sentiments de leur personnage.

Ensuite il y a ceux qui ont en eux une violence telle qu’ils peuvent la livrer sur scène. Ceux-là ont généralement l’air de lions en cage. Ils expriment une rage effrayante qui vous entraîne mais à laquelle il est difficile d’adhérer comme spectateur. … Ou comme partenaire.

Enfin, il y a ceux – plus rares et plus fragiles, qui trouvent en eux-mêmes les blessures et les failles qui vont les mettre à jour plus sûrement. Ceux-là vous bouleversent parce qu’ils vous offrent leur propre bouleversement. Ils vous touchent. De ceux-là, vous pouvez tomber amoureux. Brusquement, par surprise, quand votre corps s’aperçoit qu’il est littéralement transporté. Ceux-là, oui, quand vous les voyez, quand vous les entendez sur une scène, vous êtes transporté.

L’étrangère, film de Florence Colombani, à 29’15 »  (ce film est disponible sur Universciné)

Notre voix, en propre

Dans l’usage que nous faisons de cette voix qui est la nôtre, il s’agit surtout de ne pas « jouer », mais d’être. Ne pas passer sur le mode déclamatoire ! A l’instar du comédien, c’est notre voix en propre, même si nous la prêtons, à un rôle, à une ligne mélodique. Vivre et montrer les émotions qui nous sont propres. Dans tous les cas, à travers notre voix, l’auditeur reconnaît alors sa propre voix, ses propres émotions, son souffle, ses gestes, alors que, au départ, ni la voix, ni le geste, ni la posture ne lui sont familières, encore moins semblables. Pourtant notre voix, notre souffle, notre geste sont fondamentalement lui-même, son humanité reconnaissable.

Pourquoi voyager ?

Pourquoi voyager ? Je fais dix mètres dehors et je suis envahi de visions, submergé: je ne marche pas sous le ciel mais au fond de lui, avec sur mon crâne des tonnes de bleu. Je suffoque de tant respirer, rassasié d’air et de lumière. En dix secondes j’ai fait une promenade de dix siècles. La vie a une densité explosive. Un minuscule caillou contient tous les royaumes.

C. BOBIN, Les ruines du ciel, p. 19

Je me souviens de mon étonnement à entendre Jean Lebrun, fameux journaliste à France Culture (et France Inter), expliquer dans une émission d’hommage qui lui était consacrée, qu’il ne voyageait jamais à l’étranger. Pour lui – un homme de grande culture et de profond engagement, la France le comblait entièrement; pourquoi aller voir ailleurs, disait-il, alors que ce pays offre tant de richesses – paysages, histoire, …?

Sagesse ?