Responsable

L’autre est visage, tout entier visage. Et devant un visage, je n’ai aucun pouvoir. Je peux seulement, puisque ce visage est aussi parole, tenter de répondre, devenir responsable. Cela vaut pour les rapports d’amour, d’amitié, de collaboration, cela vaut dans la famille comme dans la société.

Olivier Clément

(merci, Cécile, pour cette citation)

Le pays du présent

(…) Le pays du passé regorge en effet de lieux riches en enseignement.

On rencontre également bon nombre de ces endroits dans le pays du présent, autant d’objets matériels et de régions, naturellement constitués ou bâtis par l’être humain, dont la myriade d’agencements locaux façonne les environnements de la vie quotidienne. Mais ici, maintenant, dans le monde en cours accompagné des ses préoccupations et perspectives actuelles, ces lieux ne sont pas considérés comme des souvenirs du passé. Lors des rares moments où l’on daigne y prêter attention, on perçoit au contraire ces lieux à l’aune de leurs aspects extérieurs – comme des lieux familiers déterminés par leur surface manifeste -, et à moins que ne survienne un événement qui viendrait ébranler ces perceptions, ils demeurent perpétuellement livrés à eux-mêmes. Puis un événement survient bel et bien. Peut-être remarque-t-on un arbre récemment tombé, une trace de peinture écaillée, ou encore une maison qui se dresse là où il n’y en avait pas auparavant – toute perturbation, qu’elle soit significative ou infime, témoignant du temps qui passe -, et un lieu révèle alors les relations qu’il entretient avec des événements passés. A cet instant précis, lorsque l’étau des perceptions ordinaires se desserre peu à peu, une frontière est franchie et le paysage se met à changer. Notre état de conscience s’est modifié, et ce lieu désormais transfiguré par l’évocation d’une époque plus lointaine revêt subitement une apparence inédite et incongrue.

Keith BASSO, L’eau se mêle à la boue dans un bassin à ciel ouvert, p. 26

Pour moi, l’écho avec Annie Dillard [Le présent], Henri Thomas [La perception comme filtre].

Le chemin du passé

Le chemin du passé est facile d’accès (n’importe quel souvenir de temps révolus permet d’y entreprendre une excursion), le trajet est rapide et commode (quelques moments de calme suffisent généralement à opérer la transition) et sur place les restrictions de circulation s’avèrent quasiment inexistantes (la mémoire et l’imagination, les plus intimes et inventifs compagnons de route, y veillent systématiquement). Et quel que soit le déroulement du voyage, on peut progresser à un rythme confortable, que l’on explore des sites d’intérêt particulier ou que l’on se rende d’un endroit à une autre, sans tracas ni hâte. Aussi est-il parfois quelque peu déconcertant de retourner brutalement dans le pays du présent, si enclin à la précipitation.

Keith Basso, L’eau se mêle à la boue dans un bassin à ciel ouvert, p. 25

Comme il est difficile …

Comme il est difficile de ne rien faire, – juste de laisser être. Comme il est difficile de faire confiance et de se laisser porter par ce qui, au bout du bout du compte, n’a pas besoin de nous pour exister, mais qui nous fait exister, nous.

André MARKOWICZ, Partages 2, p. 275 [à propos de l’art simple d’une chanson populaire]