Le sens

J’ai déjà noté quelque part, il y a pas mal de temps, comment pour moi « la musique d’ensemble (…) est la manifestation de notre façon de vivre ensemble, de créer du lien, d’établir et de conforter le sens – comme direction et signification. »

Il paraît évident de rappeler pourtant que si le mot « sens », c’est la direction [vers un but, une destination, un projet, …], si c’est aussi la signification [qui fonde notre pratique, dans la compréhension des autres et l’appréhension subtile de notre propre engagement], c’est encore [devrais-je dire, d’abord ?] la sensualité: la musique, la danse, l’expression artistique quelle qu’elle soit, ont un lien indéfectible avec le corps, en tant que présence active, jouissante, heureuse [ce qui n’exclut pas la douleur, la peur, le désespoir parfois].

Douloureuse

La mémoire, où que tu la touches, fait mal.

Georges Séféris, Pages de journal, 27 mars 1950

Au moment où, à nouveau, je me penche sur mon enfance, Séféris pointe juste.

J’avais noté, en tête de cet écrit qui peut-être ne verra jamais le jour, une ligne piochée dans la réserve quasi inépuisable du Marché de Résurgences de Jean Sur:  Et naturellement l’enfance. Non pas comme éponge à regrets. Comme magasin d’armement.

Je note, plus tard:

Je suis en plein complot avec l’ombre.

Francis Ponge

Se rencontrer

Se détacher de l’origine, apprivoiser et accueillir le vide de la séparation, permet le lien imaginaire avec un autre rencontrable. Celui qui reste fantasmatiquement fixé à l’origine, ne lâchant pas prise sur elle, ne peut accueillir ce qui arrive, être disponible, ouvert à l’inconnu en acceptant la part d’incertitude.

Elisabeth GODFRID, Des inventeurs pour une coexistence


On peut toujours se séparer. Le plus dur, c’est de se rencontrer.

Dans le très beau film Once we were stranger.


L’homme n’existe, ne se constitue, ne grandit, ne s’épanouit qu’à l’aide d’autres hommes. Le mystère de la relation dépasse de beaucoup le mystère de l’être.

Jean ZIEGLER, Retournez les fusils ! p. 12